Comment faire face à l’éco-anxiété?

Sécheresses, inondations, feux de forêt, tempêtes, les aléas climatiques sont nombreux et se font sentir chez nous aussi. L’Organisation mondiale de la santé qualifie de menace fondamentale pour la santé humaine les changements climatiques. Il est anticipé une augmentation de l’intensité et la fréquence des aléas climatiques au fur et à mesure de l’évolution de la crise climatique. La crise climatique, la transition socioécologique, les changements climatiques sont des termes qui font maintenant partie de notre réalité quotidienne. À travers cette situation, un nouveau terme émerge aussi, celui de l’éco-anxiété.

Selon le Baromètre de l’action climatique (2023), ce sont près de 3 Québécois sur 4 qui se disent très préoccupés par les problèmes environnementaux et 89 % de la population croit que les conséquences vont s’intensifier si nous tardons à agir contre les changements climatiques. La question climatique est donc bien présente dans l’esprit des Québécois.

Il existe plusieurs définitions de l’éco-anxiété. Il est possible de la comprendre ainsi : ‘’ […] par le vécu d’émotions et par des préoccupations à différents degrés à propos de l’environnement, des impacts environnementaux ou sociaux, de l’avenir ou de l’inaction observée […]’’ (Lopes, 2023 : 12).

Plusieurs s’entendent pour dire qu’une dose de préoccupation par rapport à notre environnement peut être une source de motivation et de mobilisation à l’action, voire même une réaction saine et normale aux phénomènes des changements climatiques. Pour certains, l’éco-anxiété s’accompagne d’une détresse, de désespoir, d’impuissance et peut nuire au fonctionnement optimal de la personne. Dans cette situation, il s’agit d’un problème sur le plan de la santé mentale et l’aide professionnelle est à envisager. L’éco-anxiété peut donc être vécue de façon très différente d’une personne à l’autre et amener des effets diversifiés.

Toujours selon le baromètre de l’action climatique, ce sont plus de la moitié des Québécois (54 %) qui auraient vécu de l’éco-anxiété dans la dernière année. Ce taux est en augmentation par rapport aux années précédentes. 68 % de la population ressentiraient une impuissance face aux changements climatiques. Finalement, le tiers de la population aurait ressenti souvent ou presque toujours de l’inquiétude à propos du futur de l’humanité au cours de la dernière année.

 

Qui sont les plus touchés ?

Tout le monde peut être touché à un moment où l’autre par des écoémotions, comme l’éco-anxiété. On retient que certains membres de la population y sont plus vulnérables comme les femmes, les jeunes, les jeunes parents, les scientifiques et les militants ainsi que ceux qui ont vécu des catastrophes naturelles ou vécus des conséquences directes de problèmes environnementaux. Les peuples autochtones et les agriculteurs sont d’autres groupes de la population qui sont plus à risque d’éco-anxiété.

 

Quoi faire lorsqu’on ressent de l’éco-anxiété ?

Le média de l’action climatique au Québec, un point cinq, nous propose un guide de survie à l’éco-anxiété :

1) Reconnaître nos biais cognitifs. Être conscient que nous pouvons interpréter ou percevoir les choses d’une certaine façon. Par exemple, identifier que nous avons tendance à voir le monde blanc ou noir, ou de façon catastrophique, ou autre, peut permettre le recul nécessaire pour essayer de mieux nuancer ou d’être plus objectif dans nos réflexions.

2) Accepter nos limites affectives face à la complexité des changements climatiques. Dans la même lignée que la piste précédente, reconnaître les émotions vécues en lien avec la situation climatique et accepter que nous ayons tous des limites personnelles face à l’ampleur du phénomène.

3) Chercher des sources d’information fiables. Il est possible de trouver toutes sortes d’écrits en lien avec les changements climatiques, passant du climato scepticisme aux discours alarmistes qui suscitent l’impuissance et le désespoir. S’informer via des sources d’informations fiables qui vont être axées sur les faits liés à la situation ainsi qu’aux stratégies pour y faire face. L’Institut national de santé publique offre même un guide pratique pour soutenir la communication liée aux changements climatiques (voir le lien à la section suivante).

4) S’engager dans des actions qui reflètent nos préoccupations. De manière individuelle ou collective, se mettre en action peut réduire l’anxiété en augmentant notre sentiment d’efficacité personnelle. Les actions collectives peuvent d’ailleurs contribuer aux développements de liens sociaux qui sont favorables à la santé mentale et contribuer au sentiment d’appartenance à sa communauté.

5) Pratiquer la bienveillance envers soi-même. Ne pas se surresponsabiliser quant à la situation climatique mondiale, prendre soin de soi, maintenir un équilibre entre les différentes sphères de sa vie, au-delà de l’unique préoccupation environnementale, développer et maintenir de saines habitudes de vie, pratiquer la pleine conscience, voici différentes stratégies pour permettre un recul bienveillant envers soi-même.

6) Garder contact avec la nature et le monde vivant. Le contact avec la nature est démontré comme ayant un impact positif sur la santé mentale des personnes qui s’y exposent. S’exposer au vivant, prendre le temps d’apprécier la nature est une façon efficace de se reconnecter à soi-même, sous la forme de la pleine de conscience. Ceci permet aussi un contact agréable et positif à travers le filtre alarmiste et inquiétant que l’on peut parfois avoir lorsqu’on entend parler de l’environnement.

Vivre des émotions d’éco-anxiété est normal dans le contexte actuel. N’hésitez pas à consulter si cette émotion prend une place trop importante dans votre vie, que vous éprouviez une détresse ou de la difficulté à maintenir un fonctionnement social.

 

Pour en savoir plus

Pour aller plus loin sur le sujet des changements climatiques et de la transition socioécologique, voici quelques suggestions :

→ Deux guides pour mettre en place une démarche de transition socioécologique en milieu scolaire (primaire et secondaire) réalisés par Environnement Jeunesse.

→ La Fondation David Suzuki a mis en place le Réseau Demain le Québec qui rassemble des groupes de citoyens des quatre coins du Québec qui ont à cœur la transition socioécologique.

→ Le projet VRAC (évaluation des vulnérabilités aux changements climatiques de la région de la Chaudière-Appalaches) permet d’en connaître plus sur chacune des MRC de Chaudière-Appalaches grâce à des fiches-synthèses.

→ Un guide pratique : Parler efficacement des changements climatiques de l’INSPQ.

→ Un balado hebdomadaire: Le Podcast d’Éco-Motion.

 

Références

Champagne St-Arnaud, V., Crépeau, J. et Daignault, P. (2023). Baromètre de l’action climatique : Disposition des Québécoises et des Québécois envers les défis climatiques. Groupe de recherche sur la communication marketing climatique, Université Laval.

Deegan, M.-P. (2022, 12 juillet). Qu’est-ce que l’éco-anxiété ? Tour d’horizon et pistes d’action. Cent Degrés. https://centdegres.ca/ressources/qu-est-ce-que-l-ecoanxiete-tour-d-horizon-et-pistes-d-action?gad_source=1&gclid=EAIaIQobChMI-OO0-PHoigMVs1ZHAR2uNCW4EAAYASAAEgIJnfD_BwE

Organisation mondiale de la santé. (2023, 12 octobre). Changement climatique. https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health

Lopes, I. (2023). Les visages de l’éco-anxiété. Éditions Écosociété.

Des Universitaires. (2021, 26 novembre). L’éco-anxiété. Un point cinq. https://unpointcinq.ca/article-blogue/ecoanxiete-accueillir-comprendre-prendre-en-charge/

Nature Québec. (2024, 3 avril). Mieux vivre avec son éco-anxiété. https://naturequebec.org/mieux-vivre-avec-son-ecoanxiete/

 

Rédigé par Catherine Gagnon-Grégoire, APSM, Direction de la santé publique

Prendre le temps de ralentir

Les cultures de productivité et de performance touchent plusieurs sphères de nos vies et amènent des impacts sur la santé et le bien-être de la population. Pression de performance dans nos différents rôles sociaux, accumulation de tâches, surproductivité sont devenues monnaie courante, mais la valorisation de ce rythme de vie et cette culture de performance ne se fait pas sans conséquence.

Ralentir, de quoi parle-t-on ?

Une vingtaine de partenaires intersectoriels (milieux de la santé, entrepreneuriat, ressources humaines, culture) se sont rassemblés dans un groupe de travail pour influencer un changement vers un ralentissement. Voici leur explication de ce dont il est question par ralentissement :

« Ralentir, c’est adopter un rythme de vie équilibré en adéquation avec nos besoins et nos valeurs telles que la santé, l’environnement et le bien commun, et ce autant au niveau individuel que collectif ».

Un rythme de vie essoufflant

Vous reconnaissez-vous dans ces chiffres ? Plus d’une personne de 18 à 54 ans sur 2 affirme être souvent stressée par son rythme de vie. Ce sont le quart des personnes qui considèrent avec un rythme de vie surchargé.

 

 

 

 

 

 

 

Dans ce contexte, plusieurs personnes adoptent des comportements qui vont à l’encontre de leur santé et leur bien-être comme de conduire au-delà de la vitesse permise pour gagner du temps, diminuer ses heures de sommeil, manquer de temps pour les activités physiques, de loisirs et même manquer de temps à passer avec ses proches. Les principaux facteurs évoqués qui nuiraient au ralentissement sont les responsabilités financières, familiales et professionnelles.

La majorité de la population indique que notre société devrait valoriser un rythme de vie plus lent, mais seulement le tiers considère que de ralentir est bien perçut socialement. De nombreux freins nuisent à actualiser ce changement de rythme de vie comme la croyance que le ralentissement leur risquerait de faire perdre des opportunités, que le ralentissement est contraire à la réussite et au progrès et que ce ralentissement aurait des conséquences sur leur parcours.

Les impacts

Au-delà des impacts personnels (augmentation du temps d’écran, réduction de l’activité physique, augmentation des comportements à risque sur la route, diminution du sommeil, etc.), nos rythmes de vie effrénés ont des impacts sociaux en exacerbant les inégalités sociales de santé, valorisant des standards de surconsommation et même en influençant l’aménagement du territoire. Cette impression que vous avez peut-être de courir après votre queue n’est finalement pas seulement une impression, mais un phénomène partagé par plusieurs dans notre société !

Dans ce contexte, le groupe de travail a rédigé un Manifeste pour la création de milieux de vie favorables à un ralentissement collectif afin de favoriser un changement de la tendance pour un mode de vie plus posé, équilibré et sain.

Les fondements et principes directeurs pour le projet ralentir

1) La capacité de ralentir est influencée par plusieurs facteurs individuels, organisationnels et sociaux. La responsabilité est donc partagée entre les différents paliers de notre société. Oui, des changements individuels pour ralentir votre rythme de vie, mais les milieux organisationnels et politiques ont aussi un rôle à jouer pour favoriser le changement de la culture de performance.

2) Un rythme de vie en harmonie avec soi et les autres, c’est-à-dire avec nos besoins, limites, valeurs et aspirations, est à préconiser. L’équilibre à trouver entre les différents rôles, responsabilités, valeurs, besoins est propre à chacun. Nous pouvons favoriser le développement de cet apprentissage de connaître et respecter son rythme et celui des autres.

3) Les milieux de vie doivent faciliter et favoriser l’adoption d’un ralentissement collectif. Les milieux de travail et scolaires et même l’aménagement du territoire peuvent contribuer au ralentissement.

4) Des cultures saines de consommation, de productivité et de performance, qui s’inscrivent dans un ralentissement collectif, bénéficieraient à toute la société. En d’autres mots, entretenir une relation plus saine et durable avec notre consommation, notre relation avec la productivité et la performance aura des impacts positifs pour l’ensemble de la population.

L’idée vous interpelle ?

En suivant l’adage Charité bien ordonnée commence par soi-même, faites la réflexion sur votre rythme de vie. Avez-vous l’impression de toujours être à la course, de ne pas avoir le temps de profiter des moments qui passent, d’être dépassé par les situations, etc. ? Si vous aviez plus de temps, avec qui ou à faire quoi aimeriez-vous prendre plus de temps ?

Relisez nos articles précédents sur l’équilibre de vie (avec l’exercice de la roue du bien-être) et l’importance de prendre soin de soi (avec la méthode des petits pas Kaizen) pour soutenir votre propre processus de ralentissement. Peut-être aussi qu’en réfléchissant sur votre utilisation des écrans, vous retrouvez plusieurs minutes « perdues » dans votre journée. Ce sera peut-être votre point de départ vers un rythme de vie plus satisfaisant.

Bonne réflexion !

Prenez connaissance des résultats du sondage effectué auprès des Québécois en 2023: Infographie projet ralentir

Pour aller plus loin

Ralentir peut se faire sous différentes formes. Pour explorer différentes façons de le mettre en application, voici des suggestions.

Slow-Tech/Ralentir les écrans: Pause ton écran

Fête des voisins au travail: Santé mentale Québec Chaudière-Appalaches

Le jeu libre pour les enfants: Naître et grandir

Porter votre attention au moment présent (pleine conscience): La pleine conscience

Références

Association pour la santé publique du Québec (2024). Ralentir. https://aspq.org/priorite/ralentir/

Image tirée de l’infographie de l’ASPQ (2023)

 

Rédigé par : Catherine Gagnon-Grégoire, APSM

Date : 23/08/2024